Épisode 4 | de Spiez à Giswil, en passant par Interlaken
La force de ne pas forcer
- Les réserves de glycogène ne sont pas vides, mais elles sont entamées.
- Le corps bascule davantage sur les graisses, ce qui économise mais demande aussi plus d’oxygène et de contrôle.
- Les fibres musculaires lentes continuent leur travail, mais elles ont déjà enchaîné des milliers de contractions.
- Les micro-lésions s’accumulent et avec elles une légère montée des signaux inflammatoires.
Dans le système nerveux, la vigilance baisse d’un cran.La coordination reste correcte, mais demande plus d’attention. On sent que la machine fonctionne encore très bien, elle est juste moins automatique.
Ce n’est pas le corps qui lâche. C’est le corps qui dit : je peux continuer, mais plus au même prix. Et c’est là que tout se joue. L’égo, lui, murmure toujours : “tu pourrais pousser quand même”. Mais l’endurance de plusieurs jours n’a rien à voir avec l’héroïsme. Elle repose sur cette capacité à entendre les signaux faibles : une respiration qui veut plus d’espace, un cerveau qui demande plus de calme, une énergie qui réclame de la stratégie plutôt qu’un sursaut.
Alors, entre pluie annoncée et fatigue, je décide sagement de prendre le train. Pas par renoncement. Par respect du corps, par investissement pour demain. Car l’endurance n’est pas un test de volonté brute, c’est une négociation permanente entre ambition et lucidité. Et ce jour-là, j’ai choisi la lucidité.
À Giswil, tout est calme. L’hôtel est fermé, l’épicerie me donne la clé de la chambre. J’attends sur le balcon. Mon compagnon arrive, trempé de quelques gouttes. Il pose son vélo, souffle, et me dit que l’étape était terriblement exigeante, même pour lui. Je souris, j’avais raison de m’écouter.
Ce soir, nous n’allons pas au restaurant. Au menu : sardines, pain, fromage suisse, légumes, achetés à l’épicerie. Parfois, la victoire en endurance ne se mesure pas en kilomètres parcourus, mais en kilomètres évités pour préserver ceux à venir.
La suite dans l’épisode 5 : de Giswil à Lucerne – Récupération active : quand le corps progresse en ralentissant